22 juillet 2009

La résistance

Aujourd'hui, je voudrais parler une langue qui mord. Une langue qui détruit tout sur son passage, qui s'emballe et emporte et rugit.
J'ai déjà parlé cette langue. Je la parle encore, parfois, dans la facilité, sauf qu'aujourd'hui je ne la voudrais pas facile : je voudrais qu'elle dise une chose importante, une chose grande qui me dépasse, qui rit fort et m'exalte.
Mais je ne sais pas bien cette parole qui arrache, à la Mistral des grands moments, à la Céline, encore lui, cette parole qui ébranle et qui, même tonitruante, sait dire les choses qui comptent.
Je travaille à trouver cette langue dans le monde, et je l'y vois partout, mais je ne sais pas la faire mienne. C'est que pour une fois, même si, histrion, elle s'y trimballe partout, c'est aussi le monde qui m'empêche de la parler.
Mais je résiste. Au lieu de me taire, je choisis de dire que je ne peux pas le dire.
Oui, c'est un peu bête. Mais ça vaut mieux que la lâcheté.

13 juillet 2009

T'écrire

Écrire à l'autre est un risque . Énorme. "La lettre est un risque. L'écriture ne l'est pas toujours."*

Écrire de soi à soi ne veut pas dire avoir peur du silence de l'autre, peur de ne pas entendre de réponse, de ne pas être pris, compris.

La lettre ne veut dire rien d'autre que la volonté d'être reçu, que la volonté de trouver un écho, concret. L'abandon dans la correspondance est un abandon du temps, d'abord - celui que je passe à t'écrire, celui que tu prendras pour me lire -, du corps, ensuite, de la tête, enfin. Mais à la fin. Et d'ailleurs l'écriture qui ne concerne que la tête ne m'intéresse pas. Ne m'a jamais intéressée.

À travers la correspondance, celle du coeur que je tiens maintenant, celle de la tête et du coeur que j'ai eu le privilège de tenir un jour, je me sais vivante. Je me sais quelque part entre moi et l'autre, en mouvement, offerte.

Oui. La lettre fait de l'écriture une chose qui vit. Même quand elle reste lettre morte.

* Martine Delvaux et Catherine Mavrikakis, Ventriloquies, Montréal, Leméac, "L'ici l'ailleurs", 2003, p. 60.

10 juillet 2009

Entre deux souffles, haletante.

Juste au pas de la porte, dehors, le désir. Sur le coin du bureau, entre ce Fernand Ouellette aérien et un Derrida un peu dur, le désir. Devant la glace qui reflète mon visage de douleur, le désir.

Partout "ce désir, toujours", partout cet inachèvement, ce vide, cette béance. Et sur la fracture, bancale, moi, inassouvie.

Derrière le désir, le mal. Profond. Et ses traces aux alentours.

Et la vie.