Pourtant, je ne sais pas encore si je suis snobe ou populiste. Chaque cours que je donne, je m'exprime dans un langage qui me ressemble moins que celui que j'utilise ici, pour le dire comme ça, dans l'unique but de rejoindre le plus grand nombre. Chaque cours, je gesticule comme un clown et je réfère à nos vies quotidiennes pour ancrer la littérature dans la vie - en dehors de mon amour pour certains auteurs, c'est à ça que se résume ma perspective pédagogique, pour dire le vrai.
Considérant cette approche, je devrais, normalement, me réjouir de ce que des journalistes populaires, outre Foglia, qui le fait si bien, se mettent à pondre des chroniques littéraires. Pourtant, chaque fois, je tique. Et particulièrement quand il s'agit de Patrick Lagacé.
Peut-il légitimement parler de l'"oeuvre de Camus"? En a-t-il lu plus qu'un livre, lu au cégep, par surcroît ? J'en doute. Peut-être ai-je tort, peut-être Lagacé est-il un grand lecteur. Peut-être sait-il replacer l'oeuvre de Camus dans le contexte qui était le sien : celui de l'existentialisme, de la remise en question de ce que c'est, l'humanité. Mais c'est plus fort que moi, je ne peux m'empêcher de penser que ça ne cadre pas avec le personnage.
Et alors, je me demande : à quel prix la littérature doit-elle trouver sa place dans la cité ? Jusqu'où pouvons-nous aller avant de déclarer "Toi, ci-devant, tout t'est permis, sauf parler de livres" ?
Mon coeur veut répondre à cette question tout autrement que ma tête. Et pour une fois, je pense que la pédagogue a peut-être moins raison que l'intellectuelle.