23 mars 2010

Douce perversion

Je cherchais récemment un érotisme élégant; je l'ai trouvé. Dans Coeur blanc, de Richard Millet.
Millet fait partie de ces écrivains que je déteste souvent et que je lis toujours. Avec lui : Beigbeder, Houellebecq, Gombrovicz et les autres qui pensent avoir compris. Millet, ce qu'il a compris, c'est la vraie France, la vraie Littérature, la vraie Pensée, toutes ces Choses nobles à majuscules au nom desquelles il se donne le droit de mépriser les choses minuscules et avilissantes que sont par exemple le rock ou la langue populaire. Le grand pontife est un peu ridicule; si c'est du fond de sa campagne limousine qu'il écrit, il a plutôt l'air coincé en 1857. Pourtant.
Il y a sa langue, d'abord, limpide et musicale quoique ponctuée de petites raretés, perles surannées et d'autant plus charmantes. Il y a ses personnages, ensuite, louches et gris, donc vivants. Il y a le monde qu'il continue de faire exister au fil des livres, enfin, paysage ambigu dont le ciel et la terre troubles contaminent ceux qui l'habitent. C'est un vieil homme aigri que je lis chaque fois. Soit. Au moins, il sait raconter, et bien.
Son Coeur blanc est loin d'être pur : le moraliste trahit ses obsessions dérangeantes, où de jeunes gens se découvrent à travers une sexualité marginale, solitaire ou à distance. Mais les expériences du corps qui nous sont présentées à travers ces nouvelles, si elles sont un peu redondantes, dépassent largement le monde des déjections et de la chair crue de sa Gloire des Pythre, et continuent de faire vibrer en moi le potentiel de révélation du corps sur l'âme.
Et puis il y a cet autre avantage, aussi : maintenant, j'ai une autre raison de le détester, ce vieux pervers à noeud papillon.

10 mars 2010

Liste 2 : là où l'on sait

Ce que je n'ignore pas ce matin :
que j'ai connu la poésie et m'en ennuie, qu'il n'y a rien que ton sourire de cette nuit-là ne peut calmer, que je ne parle pas mathématiques, que si j'outrepasse les limites de mon corps souvent c'est qu'elles l'ont trop longtemps empêcher d'exulter, que la liste des petites choses encore à faire ne s'épuise jamais et qu'elle est beaucoup plus terrifiante que celle où une vie avec toi se tient droit parmi les grands rêves qui éclairent ma nuit.

09 mars 2010

Liste 1 : vers le rien

Ce que je n'écrirai pas aujourd'hui :
Que je ne saurai jamais créer des personnages, que je suis essoufflée juste à m'imaginer vivre dans sa tête qui crée tout à chaque instant, que je suis si prise par l'insomnie que je ne suis pas certaine d'écrire ceci, que je trouve belle sa façon de s'emporter loin du reste et de chercher à nous amener avec lui, que je n'arrive pas à lire Julien Gracq et que je ne trouve rien pour le remplacer, que je voudrais un morceau de réel solide et coloré pour en être quitte une fois pour toutes.