19 avril 2010

Dissipée et vivante

Ma chambre a rarement été un tel bordel. Ma tête non plus, ni ce que je dis, ce que j'écris ou ce que je lis (et ne lis pas); la tendance est à l'éparpillement.
J'écoute Marilyn Manson très fort quand, trop tard et trop tôt, j'essaie vainement de m'endormir, mais je choisis Arvo Pärt en douceur pour travailler. Je suis épuisée, et cruellement, mais je dévore tout ce qui se trouve sur mon chemin pour ne pas ralentir. Je sacre et je rigole en enseignant, mais je perds la tête dans de v(il)ains vertiges quand vient le moment d'aimer ou de sourire.
Oh, et je travaille sur L'Attrape-coeurs, aussi, pour et avec de jeunes lecteurs. C'est chaque fois pareil : j'en tombe si férocement amoureuse que je voudrais moi aussi dériver n'importe où en dehors de ce qu'on attend de moi.
Si j'y arrive ? Non, évidemment. Mais, même à ma toute petite mesure, je continue d'essayer. C'est moins ennuyant.

11 avril 2010

Liste 3 : du bout du monde

Ce que je vois devant moi :
l'espoir de regards sous le charme, la fin peut-être de la dureté tranchante qui me tient lieu de masque, l'espace multiplié de cette parole qui m'appelle, un rêve et ton visage : tu m'as comprise.

04 avril 2010

Le strict nécessaire

Pas le roman, non; difficile de légitimer la création d'un système reposant sur l'hypothèse d'une unité dans ce monde où le sens passe - je dois malheureusement donner raison à Derrida - par la différence. La poésie? Peut-être. Mais elle doit raconter pour s'inscrire dans la vie, ou l'inscrire en elle. Ce serait donc plutôt la prose ou le récit poétique. En fragments, parce que je ne sais rien dire d'autre que les couleurs de l'instant.
Mais des couleurs, ça ne suffit pas. Je voudrais savoir ce que je voudrais dire qui serait nécessaire, viscéral. Quelque chose qui pourrait me transformer presque autant que l'exercice de la pensée, quelque chose qui, peut-être, transformerait aussi celui qui y trouverait une résonance pour lui.
Je le vois partout, ce nécessaire, ou le devine pour être plus juste. Et je sais un peu comment je voudrais le dire. Mais c'est un travail à recommencer chaque fois : la durée n'est pas une alliée pour cette écriture d'un nécessaire petit et assez humble pour ne rien vouloir dire de plus que l'essentiel.

03 avril 2010

Poussières sur la ville (hélas, je n'ai pas pu faire mieux)

Cette semaine en aura été une de réconciliations.
Il y a eu ce cordonnier, d'abord, petit homme fébrile et croyant qui a trouvé son espace, minuscule et vivant, entre deux étagères débordantes de chaussures abandonnées, des dizaines de bottins téléphoniques encore emballés et des décennies de petites histoires vécues à travers des clients qu'il questionne non pas pour être poli, mais parce qu'elle est là sa vie, au bout d'un chapelet fièrement exhibé et dans le regard de ceux qui viennent à lui.
Il y a aussi eu ces marches dans le gris de la ville, Ontario, de Maisonneuve, Sainte-Catherine en poussières, habité par des êtres obliques qui m'émeuvent autant qu'ils m'effraient : on ne sait jamais ce qui peut sortir d'autant de vraie soif et de discussions de coin de rues.
Il y a eu des lectures faites dans des cafés bondés, voisinage - les livres et les gens - dont je m'abreuve ces jours-là pour enfin un peu sortir de moi.
Et il y a eu une vérité, petite mais importante, qui une fois dite m'a libérée, comme le font toutes les vérités, quoi qu'on en dise.
Oui. Cette semaine, j'ai trouvé dans le gris de la ville quelque chose comme un sublime, une beauté sale qui faisait du bien à ce qui clochait en moi : l'oubli trop prolongé d'une quête qui a longtemps été la mienne, et qui consiste à chercher le moins ardemment possible quelque chose à raconter. C'est toujours comme ça que les histoires commencent.