30 janvier 2010

Aujourd'hui

Tout dernièrement, j'ai relu ce que j'ai écrit ici. C'est une chose que je fais assez peu, et je vois bien pourquoi : l'exercice est cruel.
D'abord parce que cet idéal qui motive ma parole provoque une certaine redondance, signe que j'ai au fond bien peu d'idées qui comptent. Aussi parce que, malgré toute ma bonne volonté, malgré tous ces moments où, presque chaque jour, je pense "ah, voilà qui mériterait d'être raconté", j'écris trop peu. Je n'ai pas la parole facile, et suis le plus souvent beaucoup trop orgueilleuse pour risquer qu'elle trahisse les petites idées qui me tiennent à coeur. Je ne suis ni pire ni meilleure qu'un autre, évidemment. Mais c'est quand même un peu déçue que j'ai - encore - compris, devant le peu que j'ose écrire, la fragilité de cet idéalisme auquel je m'accroche même s'il ne fait pas le poids devant les jours qui filent, les silhouettes qui fuient et le confort des silences gris.
Heureusement, il y a malgré tout quelque chose qui m'est apparu grâce à cette relecture, une chose toute bête, sûrement, mais qui éclaire autrement le temps que je consacre à rédiger ces quelques textes. De tous les mots, outre l'idéal, c'est celui-là, "aujourd'hui", qui apparaît le plus souvent sur ce blogue. J'en suis ravie.
Il me sert d'ancrage, évidemment, parce qu'écrire n'est rien d'autre, pour moi, qu'une tentative de cerner ce qui vit dans les quelques instants où le temps s'arrête, ou continue, et sublime ce qui passe avec lui. Ainsi, je vois dans ce mot transparent une illustration de ce que j'aimerais savoir faire : montrer ce temps sous une lumière nouvelle, sous un jour nouveau, comme on dit, pour que, l'élucidant, j'existe moi aussi davantage. L'écriture me fait entrer dans un état de temps que je souhaiterais pouvoir traduire; pour le moment, c'est en m'arrêtant à cet "aujourd'hui" plus vaste que l'instant que je tâche d'y parvenir.
Parce que si l'aujourd'hui est une durée perpétuellement réalisée, active et bouillonnante, elle pose tout de même des bornes, même illusoires, utiles à ma pensée trop ambitieuse pour ses moyens. Dans l'aujourd'hui, j'ai un pied dans le possible et un autre dans l'achevé, et le monde que j'habite s'en trouve multiplié. C'est une solution facile, peut-être, mais elle a le mérite d'être une des rares portes d'entrée que j'ose traverser pour aller vers une parole qui m'effraie toujours autant qu'elle m'exalte et me crée.
Le peu que j'ose écrire témoigne donc certes de la fragilité de mon idéal, de mon incapacité à lui rendre justice comme je souhaiterais tant le faire, mais s'il peut continuer de se situer dans la lumière du temps ouvert et révélateur de cet aujourd'hui qui manifestement le gouverne, ce peu aura tout le même le mérite d'avoir pris le risque le plus noble à mes yeux, celui d'une parole modeste, collée à ce qu'elle connaît le mieux : le jour qui l'a fait être.

20 janvier 2010

L'avant, l'après

Prise de quelques regrets, aujourd'hui j'ai regardé les quelques mois à venir en oubliant qu'ils n'avaient encore rien dit.
Je n'ai jamais planifié mon avenir, mais j'ai toujours pris soin de trouver des stratégies pour ne pas oublier le passé. Ma vie est ainsi faite de retours sur des lieux déjà habités, des écoles déjà fréquentées, des gens déjà côtoyés. Et j'aime ces retours qui me rappellent ce qu'il y a eu d'éclaté en moi, de rieur et de fou.
Le seul toujours que je connaisse est donc celui de l'avant, que je nourris et manipule pour que ne s'oublie que ce m'avait ternie. Quand, comme maintenant, l'avenir que j'anticipe m'angoisse et me rend grise, je cesse pourtant de penser la durée et me donne la liberté de cesser d'aspirer au "mot toujours / qui est le mot le moins humain qui soit / et le plus cruel, et le plus étranger.*"
Ça a sans doute moins d'élan, mais il me faut peut-être autant de force pour affronter l'immobile que pour me précipiter vers ce qui vient. Alors j'essaie, pour voir.
*Pierre Nepveu, Les verbes majeurs, Montréal, Éditions du Noroît, 2009, p. 37.

17 janvier 2010

Haïti

Je venais de terminer L'énigme du retour, reçue en cadeau pour Noël. Je n'en avais pas pensé beaucoup de bien. Le sens un peu lourd de la formule donnait, pour quelques belles idées, beaucoup d'écriture. Trop d'écriture.
Sauf que voilà, je n'y peux rien, c'est bête, c'est naïf, c'est simple, mais c'est comme ça : depuis quelques jours, j'ai l'impression d'avoir une source de lumière posée sur le coin de mon bureau.

08 janvier 2010

L'ennui

Je traverse une insomnie ce soir, qui me désole un peu.
Petite, pour m'aider à dormir bien plus que parce que j'en avais peur, je prenais plaisir à animer les ombres des vêtements dans mon garde-robes pour qu'elles deviennent ces choses effrayantes qu'il semblait d'usage de craindre.
Cette nuit, j'ai eu beau essayé, ça n'a rien donné.
C'est tout de même triste de n'avoir plus rien que des petites peurs ordinaires - décevoir, perdre, échouer, se perdre - pour meubler les moments creux. Ce doit être ça, l'ennui : ne plus oser sauter sur le tremplin de la peur nouvelle.
Je ferais bien d'aller dormir, je crois. J'y risque plus, et moins à la fois.