24 juin 2010

Ecce homo

Je ne sais plus bien où j'en suis. Mon corps est sur le point de craquer - je le lui pardonne : après 11 mois de travail sans pause, il a bien le droit de me faire savoir qu'il existe - et le reste aussi.
Hier soir, c'était le dernier cours magistral que je donnais en 11 mois. Sur Huis clos, qui plaît d'ordinaire aux étudiants et qui synthétise un existentialisme qui a, pour eux, des échos dans la "vraie" vie. Je le sais : c'est à leur âge que j'ai découvert cette pièce dont l'éthique fondamentale m'avait semblé être une solution à mon malaise perpétuel. Et les deux autres fois où je l'ai enseignée, elle avait effectivement voulu dire quelque chose pour eux. Mais pas cette fois-ci. Cette fois-ci, c'est plutôt dans une indifférence criante qu'ils ont accueilli mon enthousiasme; le vide dans leurs yeux et les silences lourds qu'ils m'infligeaient en disaient longs sur l'abîme qu'il y avait entre eux et moi.
Cela arrive, parfois. Mais hier soir, fatiguée, je n'ai pas pu le supporter, et j'ai craqué. Je leur ai dit combien leur insensibilité m'effrayait, combien je me désolais devant des gens si peu vivants, curieux. Mais je l'ai mal dit, au bord des larmes et tremblante. Et ils ne le méritaient pas tous.
Ce matin, je suis donc tout bonnement prise par les remords de l'enseignante qui a débordé. Pour me calmer, je plonge dans Beloved, de Toni Morrison, qui n'a rien de calmant mais dont l'atmosphère trouble m'éloigne des petits soucis réels qui n'ébranlent rien sauf moi. C'est dans un contexte similaire que j'avais lu Faulkner, plus jeune, presque tout Faulkner, sous un soleil chaud qui brûlait un peu la solitude que je n'arrivais pas à supporter et dont je ne savais pas sortir.
En m'entourant de fantômes et d'étrangeté, j'oublie un peu que je suis trop humaine. Ça fait du bien.

6 commentaires:

Mek a dit…

Bonne Saint-Jean.

Anonyme a dit…

How One Becomes What One Is ...

your a good teacher and you must be very tired ,tho i think your students are interested but are you expecting them jumping all over the place in a french litterature class? Most of them like the way you teach... interêt? c'est sur,vous render le cours interresseant et moin ennuyant car la littérature n'est pas pour tous et le silence lourd? éleve gêné?éleve fatigue? éleve avec incompréhension?
Vous avez craquez en pleine pause ...wich was random and confusing
hope you feel better now your are a good teacher but french is somehow boring in summer and after work de-pre-ssing!

J. a dit…

Pfouah! On m'a démasquée! Et en anglais, qui plus est! Merci de ne pas contribuer à ce que ça se reproduise en gardant le secret. Mais... mais... comment as-tu trouvé?

Mek a dit…

Habitant le Languedoc, je vais de ce pas informer mon entourage de l'ennui estival que représente le français.

J. a dit…

Hé hé... Pour ma part, j'ai dû apprendre à rester de glace devant ce genre de constat - typiquement cégepien (j'en suis très souvent incapable, hélas!) - mais pour ceux qui n'y seraient pas habitués, voilà qui risque de causer tout un choc. Une petite consolation : l'anglais approximatif n'est pas moins ennuyant que le français, et été comme hiver à part de ça.

Anonyme a dit…

comperio...

i use english in order for me not to be recognize by you , and i found your website on the first day of class ...bon,bon,bon de retour a ma disserte final ...