Millet fait partie de ces écrivains que je déteste souvent et que je lis toujours. Avec lui : Beigbeder, Houellebecq, Gombrovicz et les autres qui pensent avoir compris. Millet, ce qu'il a compris, c'est la vraie France, la vraie Littérature, la vraie Pensée, toutes ces Choses nobles à majuscules au nom desquelles il se donne le droit de mépriser les choses minuscules et avilissantes que sont par exemple le rock ou la langue populaire. Le grand pontife est un peu ridicule; si c'est du fond de sa campagne limousine qu'il écrit, il a plutôt l'air coincé en 1857. Pourtant.
Il y a sa langue, d'abord, limpide et musicale quoique ponctuée de petites raretés, perles surannées et d'autant plus charmantes. Il y a ses personnages, ensuite, louches et gris, donc vivants. Il y a le monde qu'il continue de faire exister au fil des livres, enfin, paysage ambigu dont le ciel et la terre troubles contaminent ceux qui l'habitent. C'est un vieil homme aigri que je lis chaque fois. Soit. Au moins, il sait raconter, et bien.
Son Coeur blanc est loin d'être pur : le moraliste trahit ses obsessions dérangeantes, où de jeunes gens se découvrent à travers une sexualité marginale, solitaire ou à distance. Mais les expériences du corps qui nous sont présentées à travers ces nouvelles, si elles sont un peu redondantes, dépassent largement le monde des déjections et de la chair crue de sa Gloire des Pythre, et continuent de faire vibrer en moi le potentiel de révélation du corps sur l'âme.
Et puis il y a cet autre avantage, aussi : maintenant, j'ai une autre raison de le détester, ce vieux pervers à noeud papillon.
2 commentaires:
Sans vouloir me vanter, je ne crois pas que tu trouveras dans mes livres d'érotisme élégant.
Pfouah! Chacun son truc, hein, après tout...
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