28 mai 2012

Le juste pas

Je suis une romantique qui ne sait pas s'élancer. Sauf dans la colère. Et ça use.

Je cherche souvent, sans le trouver, le surplus de beauté qui manque à mes jours vides sauf de vices : mes yeux mal fermés ne scrutent pas là où il faut. Même ma manière d'aimer se ternit, s'avachit. Ainsi affaissée,  l'effort qu'il m'en coûterait d'aller puiser dans les livres cet éclairage nécessaire m'apparaît surhumain. Et alors je ne fais plus rien sauf marmonner, boudeuse - oui, ça peut durer longtemps.

Seuls certains jours, ceux où le courage me prend d'aller trotter un brin les yeux bien bas, m'éloignent de la pensée de toutes les vies cassées par ce printemps de merde. Ces jours-là, les paires de souliers usées que j'entends scander "assez" suffisent à me convaincre que même si, c'est vrai, il y a toujours l'éclat que je cherche quelque part sur la rue, je ne dois jamais cesser de traîner proche des auteurs, ces autres promeneurs, qui jettent justement vers moi pile ce qu'il faut pour me donner l'élan qui me manque souvent pour me lancer parmi la foule.

08 mai 2012

Des vacances en tout-inclus

Prendre 4 fois par jour, aux 8 heures. Ne pas consommer en même temps que le calcium qui vous a été prescrit. (Penser à mettre une minuterie pour respecter une alternance.) Risque de complication avec la prise de somnifères. (Les prendre une heure avant ceux-ci pour pouvoir même espérer dormir.) Forte diminution des effets des contraceptifs oraux. (La bonne nouvelle : de toutes façons vous êtes beaucoup trop gelé pour même penser à désirer.)

Mâcher 2 concentrés de X au matin, s'en faire une infusion 3 fois par jour, penser à boire beaucoup d'eau, de Y et de Z. Ne pas boire d'alcool. Dormir beaucoup. (Voir vos acouphènes comme une musique.) Continuer bien sûr la prise des médicaments habituels. Bien suivre le rythme des rendez-vous hebdomadaires chez l'osthéo, l'acuponcteur, le psy et le médecin : l'annulation entraîne des frais.

Manger beaucoup de légumes, pas trop de viande, arrêter le café, diminuer le sucre (suffit, ton chocolat). Ne pas oublier de bien respirer. Surtout en cas de crise. Méditer 15 minutes par jour, puis 30. Puis plus du tout. Puis recommencer, ne plus y arriver, en être obsédé.

Se mépriser, s'exalter, se condamner, et s'en balancer.

C'est quand même merveilleux d'avoir du temps pour s'occuper de soi. Comme si on avait besoin de ça.

04 mai 2012

La grève qui tue : un autre point de vue

Ça fait longtemps que j'ai pas parlé. Je parle plus. Je sors plus. Quand je le fais, ça va tout croche.

Les derniers mois ont été durs. Et ça plombe encore. Ça fait que ce sera pas joli, ça ressemblera pas à des phrases faites de beaux morceaux musicaux qui coulent ou à des moments suspendus comme dans mes lectures préférées. Ça va ressembler à ma face échevelée, qui se regarde dans le miroir chaque matin mais qui voit juste la boule qui prend mon ventre, qui le lâche pas. Elle me lâche pas.

C'est vrai, c'est l'ordre des choses, ne rien pouvoir faire pour aider une mère malade, ne rien pouvoir faire devant l'inconnu. Penser à soi, à tout ce qui se pense pas. Geler raide dans le néant.

C'est vrai, c'est beau, la grève. Je suis pas contre la vertu. Je suis même d'accord : je veux croire que l'éducation bla bla bla. Mais depuis plus d'un mois, j'ai plus de travail - et mon travail me garde en vie -, j'ai plus une cenne, je sais pas vers quoi je m'en vais, je reçois des messages de mamans, de raccrocheurs, de mélangés qui lâchent l'école, qui abandonnent, qui en peuvent plus. Je sais pas quoi leur répondre.

Je les aime bien, les gens gentils qui partagent des articles qui ont six mois de retard sur des nouvelles sans rapport avec la grève au nom d'une cause sociale, d'une histoire qui changerait, d'une justice qui se rétablirait.

Mais si c'est pas en train de gruger ta vie, cette grève-là, c'est peut-être un peu facile d'y croire encore.

Moi, j'ai plus d'espoir.