D'abord parce que cet idéal qui motive ma parole provoque une certaine redondance, signe que j'ai au fond bien peu d'idées qui comptent. Aussi parce que, malgré toute ma bonne volonté, malgré tous ces moments où, presque chaque jour, je pense "ah, voilà qui mériterait d'être raconté", j'écris trop peu. Je n'ai pas la parole facile, et suis le plus souvent beaucoup trop orgueilleuse pour risquer qu'elle trahisse les petites idées qui me tiennent à coeur. Je ne suis ni pire ni meilleure qu'un autre, évidemment. Mais c'est quand même un peu déçue que j'ai - encore - compris, devant le peu que j'ose écrire, la fragilité de cet idéalisme auquel je m'accroche même s'il ne fait pas le poids devant les jours qui filent, les silhouettes qui fuient et le confort des silences gris.
Heureusement, il y a malgré tout quelque chose qui m'est apparu grâce à cette relecture, une chose toute bête, sûrement, mais qui éclaire autrement le temps que je consacre à rédiger ces quelques textes. De tous les mots, outre l'idéal, c'est celui-là, "aujourd'hui", qui apparaît le plus souvent sur ce blogue. J'en suis ravie.
Il me sert d'ancrage, évidemment, parce qu'écrire n'est rien d'autre, pour moi, qu'une tentative de cerner ce qui vit dans les quelques instants où le temps s'arrête, ou continue, et sublime ce qui passe avec lui. Ainsi, je vois dans ce mot transparent une illustration de ce que j'aimerais savoir faire : montrer ce temps sous une lumière nouvelle, sous un jour nouveau, comme on dit, pour que, l'élucidant, j'existe moi aussi davantage. L'écriture me fait entrer dans un état de temps que je souhaiterais pouvoir traduire; pour le moment, c'est en m'arrêtant à cet "aujourd'hui" plus vaste que l'instant que je tâche d'y parvenir.
Parce que si l'aujourd'hui est une durée perpétuellement réalisée, active et bouillonnante, elle pose tout de même des bornes, même illusoires, utiles à ma pensée trop ambitieuse pour ses moyens. Dans l'aujourd'hui, j'ai un pied dans le possible et un autre dans l'achevé, et le monde que j'habite s'en trouve multiplié. C'est une solution facile, peut-être, mais elle a le mérite d'être une des rares portes d'entrée que j'ose traverser pour aller vers une parole qui m'effraie toujours autant qu'elle m'exalte et me crée.
Le peu que j'ose écrire témoigne donc certes de la fragilité de mon idéal, de mon incapacité à lui rendre justice comme je souhaiterais tant le faire, mais s'il peut continuer de se situer dans la lumière du temps ouvert et révélateur de cet aujourd'hui qui manifestement le gouverne, ce peu aura tout le même le mérite d'avoir pris le risque le plus noble à mes yeux, celui d'une parole modeste, collée à ce qu'elle connaît le mieux : le jour qui l'a fait être.
2 commentaires:
c'est peut-être qu'une idée, mais t'as l'air pas mal "conceptuelle, non ?
en tous cas, moi, je préfère me lire moi que les autres.
Peut-être un peu conceptuelle, mais est-ce un mal? Et puis il y a ces entrées-là, avec ce ton-là, et les autres, plus anecdotiques, qui s'attardent justement à cet aujourd'hui, et uniquement. Mais je ne vois pas pourquoi je m'expliquerais : je n'ai rien contre les concepts, ils sont même parfois très utiles, surtout pour être déjoués.
...
Tu préfères te lire?
Alors que fais-tu ici?
Et pourquoi irait-on te lire?
Enregistrer un commentaire